Les data en forme
Chaque semaine, les data-journalistes d'OWNI dressent un panorama du meilleur de la donnée sur le web : des cartes, des jolies couleurs, un florilège de signifiants dans ce monde brutal de bits.
Tu n’es pas sans savoir, lecteur, que cette succession infinie de bits qu’on appelle un peu partout la “data” – qui vient du latin, pas de l’anglais, ne sois pas bougon – est une passion sans égale chez OWNI. Du coup, étant donné qu’il est assez vraisemblable que c’en soit une pour toi aussi, même naissante, nous nous permettons de te communiquer quelques éléments de veille sur le sujet ; à défaut de pouvoir être traitée de manière exhaustive sur le rythme hebdomadaire auquel nous voudrions t’habituer, cette veille suscitera chez toi, lecteur, tout l’émoi qu’elle mérite. Du moins l’espérons-nous.
L’avenir est dans les cartes
On démarre la rubrique carto avec un petit #oldlink qui date (quand même) du printemps, mais vu qu’il est récemment remonté dans notre veille, on se dit que tout le monde ne l’a pas forcément remarqué à sa parution, bien concentrés que nous étions à surveiller l’apparition des premiers bourgeons.
The World of Seven Billion est (donc) un très joli dossier propulsé par National Geographic pour célébrer le passage (virtuel) des sept milliards d’êtres humains sur Terre. Mappemonde épurée, d’une belle lisibilité grâce à l’usage du fond noir et de couleurs vives figurant les différents niveaux de revenus couplés à la densité de population sur les cinq continents. Une cartographie qui s’appuie sur les données publiques de la Banque mondiale et qui ferait bonne tâche (mais pas tache) dans toutes les salles de classe. En guise de repère contextuel, cette carte est accompagnée de ses principaux vecteurs démographiques, catégorisés selon la moyenne compilée de chaque niveau de revenu dans le monde, et les indicateurs courants de santé publique, d’éducation, de fertilité ou d’accès à la technologie sont ainsi représentés sous une forme sans fioritures, entre logotypes et géométrie.
Dans le même ordre d’idée (un peu #oldlink, et un peu #dark), une pimpante cartographie des États-Unis s’affiche sous le prisme de ses dénominations géographiques génériques, ou toponymes. En se basant sur les données ouvertes (voilà, ça sert aussi à ça, l’open data) du bureau d’inspection géologique étasunien, Derek Watkins peint une carte comme un tableau du pointilliste Georges Seurat, en couleurs inversées sur fond de considérations linguistiques. Où sont les ruisseaux, les marécages, les marais, les bourbiers, les rios et les arroyos qui se retrouvent par centaines de milliers dans le nom des bouts de terres humides et spongieuses, qui, mises bout à bout, forment les États-Unis d’Amérique ? Preuve par l’image : rarement aux mêmes endroits. Et il n’est point besoin d’être anglophone ni géologue pour le comprendre.
Autre carte, nécessaire comme le sang dans nos veines, est celle de l’internet sous-marin réalisée par TeleGeography. La firme de conseil et de recherche californienne, spécialisée dans les telecoms, a compilé ses propres sources pour dresser ce portrait interactif des quasi 200 systèmes sous-marins de câblages permettant (entre autres) à cet article de parvenir à s’afficher sur votre écran. En tant que telle, c’est dans l’adage “Less Is More” (simple et efficace) que réside la force de cette application : une bonne Google Map, des paquets de données géographiques et le tour est joué. Reste à cliquer sur un câble pour obtenir les informations élémentaires le concernant : date de mise en service, longueur du câble, son propriétaire, ses points d’entrée et de sortie et l’adresse du site qui y promeut son règne.
Enfin, dans la série “je fais de la cartographie de qualité en HTML5″, Martin De Wulf n’est pas en reste : son projet, à la fois sobre et ambitieux, est de dresser une carte des migrations à l’échelle mondiale grâce à la base de données du centre anglais de recherche et de développement sur les migrations, la globalisation et la pauvreté. Dans l’utilisation, compliqué de faire plus simple : le passage de la souris sur un pays de ce planisphère sombre permet de découvrir des données économiques et sanitaires de base, et le clic sur chaque pays offre une visualisation instantanée des flux migratoires principaux – tant en départs qu’en arrivées – et les données associées. Détail ultime qui en fait une véritable application, l’ensemble est “cachable” par le navigateur, et permet donc sa consultation hors-ligne. Du très beau travail.
Gnōthi seautón
Connais-toi toi-même, disait-on à Delphes. C’est sans doute la louable intention de la célèbre compagnie d’analyse de données sur le web Hitwise, qui dévoile cette semaine sur son blog une “infographie” nommée : “l’usage de l’internet anglais résumé en une heure“. Alors, nous sommes un peu forcés de mettre infographie entre guillemets, car le résultat produit est pour le moins perfectible dans l’espace insondable et subjectif qu’on appelle sans modestie esthétisme. Toutefois, nous estimons que l’aboutissement du travail d’analyse consistant à comprendre comment #lesgens passent leur temps en ligne mérite d’y laisser un œil ou deux. Ne serait-ce que pour digérer que les Anglais ont passé plus de 3 milliards d’heures sur internet au mois d’août. Dont presque un quart sur les seuls réseaux sociaux. Soit cinq fois plus que sur les sites d’actualités et sept fois plus que dans leur courriel. Et que les Grands-bretons ne consacrent (statistiquement) que deux minutes par heure aux sites olé-olé. On est obligé d’y croire.
La deuxième infographie plutôt moche de la semaine, qui mérite cependant indubitablement un traitement néo-socratique, est celle fomentée par le site 1000memories, qui veut t’aider, lecteur, à organiser, partager et découvrir les photos vieillottes de ta famille et de tes amis. Là encore, les minimalistes amateurs du “Less is More” apprécieront l’extrême lisibilité de cette illustration, qui manie le treemap à merveille pour mettre en parallèle le nombre de photos présentes sur quatre plates-formes bien connues : Facebook, Flickr, Instagram et la bibliothèque du Congrès. Et en matière de stockage de photographies, au risque d’utiliser un cliché : la vérité est ailleurs.
Cette nuit, j’ai eu un Flash
Le Flash c’est le mal. Mais vu qu’on est (donc) ouverts comme du chouette code HTML chez OWNI, il est impossible de ne pas mentionner cette semaine le remarquable travail de synthèse sur les élections sénatoriales propulsé par le site du Sénat lui-même, à l’occasion – sans surprise – du scrutin de dimanche portant sur le renouvellement partiel de cette magnifique assemblée. Tout ce que le citoyen doit savoir sur l’élection est déployé sobrement, en deux langues, et pensé “accessibilité” comme l’atteste la voix mélodieuse de la dame qui parle à l’intérieur. Ne manque sous aucun prétexte, cher lecteur, de te rendre sur ce site de service public qui favorise la publication de données facilitant leur réutilisation. Ça s’appelle (encore) l’open data, et c’est vraiment très bien. Juste dommage pour le Flash.
Laisser un commentaire